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DECLARATION FINALE DU VILLAGE SANS TERRE A SEGOU DU 26-27 MARS 2018


mardi 19 février 2019, par Aicha Koné

Nous paysannes, paysans, villageoises, villageois, victimes des accaparements de terre au Mali, tant dans les espaces urbains, péri-urbains que ruraux, représentantes et représentants des autorités nationales, régionales et locales, représentants de la FAO, des services techniques, de l’Office du Niger et de l’Office du Moyen Bani, représentantes et représentants d’ONG et d’associations, universitaires nationaux et internationaux, étions plus de 500 personnes à participer à la 4ème édition du Village des sans terre de la Convergence malienne contre les Accaparement de terre (CMAT).
Officiellement ouverte par le préfet de Ségou, cette 4ème édition s’est pour la première fois déroulée en région, les 26 et 27 mars 2018
En cette journée nationale des Martyrs de la révolution, le dialogue et la construction collective ont permis de réaffirmer l’urgence de résoudre les conflits fonciers et les injustices sociales et culturelles du pays, notamment sur les terres aménagées et aménageables de l’Etat.
Parce que les communautés sont dépossédées de leurs terres ancestrales, parce que l’espace d’interpellation démocratique est saturé de réclamations sur une justice foncière respectueuse des droits fonciers coutumiers, parce que les tribunaux sont saturés de procès sur le foncier basés sur ce qu’on appelle le « droit moderne », héritage de la colonisation, il faut trouver des solutions.
Grâce à nos convictions d’organisations paysannes et de mouvements de base, réunis au sein de la CMAT, grâce à notre persévérance pour avoir maintenu au maximum la cohésion sociale au sein des communautés à travers des actions de mobilisation qui leur ont redonné la dignité de lutter pour leur droit, nous avons aussi su mettre en place des espaces de dialogue, notamment, la plateforme multi-acteurs et le cadre de concertation de gouvernance foncière qui ont aujourd’hui activement participé à cette nouvelle édition du Village sans Terre.
La loi sur le foncier Agricole promulguée le 11 avril 2017 qui reconnait les terres agricoles des communautés, l’espace vital des villages et les terres familiales est une grande innovation juridique et sociale pour le Mali mais aussi pour toute l’Afrique de l’ouest. Elle permet de mettre en place une réelle justice foncière, sociale et culturelle pour un avenir prospère et équitable pour chaque malienne et malien. Cette loi est également en phase avec les textes internationaux tels que les Directives Volontaires pour la gouvernance responsable des régimes fonciers de la FAO et les cadres et lignes directrices de l’Union Africaine sur les politiques foncières en Afrique.
Nous sommes fiers que le Mali se base sur son héritage issu de la charte de Kouroukanfouga pour réaffirmer que « la force d’un peuple c’est la terre ».
L’espace du Village sans terre a permis d’envisager concrètement la mise en œuvre de la loi foncière agricole promulguée il y a quasiment un an et qui met en œuvre de son décret du 14 mars 2018, les droits des communautés sur leurs terres agricoles, communautés qui doivent être au cœur du dispositif avec les commissions foncières villageoises.
Ainsi, la 4ième édition du village des sans terre est le symbole de cette volonté collective, de l’Etat, des élus des communautés et de la société civile pour trouver de vraies solutions et résoudre les conflits, car sans sécurisation foncière il ne pourra y avoir de paix au pays ni de souveraineté alimentaire.
Nous avons également profité de cet espace pour échanger nos connaissances et affirmer que l’agroécologie paysanne qui valorise les savoirs des paysannes et paysans, les semences paysannes et les races locales, est la voie pour répondre aux défis du changement climatique, et de la souveraineté alimentaire.
En effet, l’autre enjeu de cette rencontre est de définir le modèle d’agriculture et de société que nous défendons pour ces terres et pour notre souveraineté alimentaire déjà inscrite dans la Loi d’Orientation Agricole. Les défis de la croissance démographique, du réchauffement climatique, de l’appauvrissement de nos sols, de la pollution des eaux par l’agriculture industrielle et chimique qui impactent aussi la santé des populations, nous exigent une bonne organisation autour de réelles dynamiques territoriales pour produire sainement en valorisant les savoir-faire paysans, la biodiversité, les semences paysannes et les races locales pour développer des terroirs en agroécologie paysanne, avec comme socle commun le manifeste de l’agroécologie paysanne de Nyéléni.
Aussi, nous recommandons de :
  Mettre fin à toutes formes de violences physiques sur les communautés villageoises et à tout accaparement de terre des communautés et rendre justice sur les cas de criminalité sur les paysans ;
  Résoudre les conflits qui perdurent depuis des années et qui se retrouvent dans les 10 doléances remises au gouvernement lors du 1er village sans terre ;
  Mettre en cohérence les différents textes sur le foncier dans le cadre de la reforme domaniale et foncière en s’appuyant sur les acquis de la LFA, notamment la reconnaissance des terres ancestrales des communautés ;
  Appliquer de manière cohérente la Loi sur le Foncier Agricole, notamment :
o Opérationnaliser les Commissions Foncières de villages et de fractions et le respect des droits fonciers coutumiers sur toutes les terres ;
o Mettre en place un dispositif de formation et d’information par le cadre de concertation de gouvernance foncière pour la mise en place des Commissions Foncières de village et de fraction ;
o Appliquer l’attribution des 15 % des terres aménagées au femmes, aux jeunes et les groupes vulnérables ;
  Respecter les engagements pris par les autorités qui ne peuvent continuer à repousser la mise en œuvre des recommandations officielles et conjointement élaborées, en se basant sur des arguments inappropriés, notamment financiers ;
  Opérationnaliser le cadre de concertation entre l’Office du Niger et les collectivités territoriales, tel que prévu par le décret de gérance de 2014 ;
  Impliquer les communautés dans l’élaboration des textes de sécurisation et de gestion des terres de l’Office du Moyen Bani ;
  Mettre en œuvre les recommandations de la mission conjointe primature/CMAT de 2014 afin que les communautés de Sanamandougou et des 7 villages de San puissent vivre dignement de leurs terres ;
  Résoudre les problèmes d’éviction des exploitants sur les terres aménagées et respecter les normes et les textes concernant l’octroi des baux notamment la réalisation effective des études d’impact environnemental et social ;
  Mettre en place un comité de suivi pour la mise en œuvre des engagements pris envers les communautés affectées par la société N’Sukala, stopper la contamination chimique des eaux et ordonner d’urgence une étude d’impact environnementale et sociale dans la zone ;
  Abandonner toute initiative tendant à la reprise du projet SOSUMAR dans la zone du Sana (Sansanding) conforment à la position des communautés de la zone ;
  Stopper l’utilisation anarchique des systèmes de dragage qui entrainent une diminution des niveaux d’eau et polluent les ressources ;
  Respecter les droits coutumiers des villages et des hameaux dans l’amodiation des forêts, notamment celles de Mande wula et de Nema wula ;
  Mettre en place des terroirs en agroécologie paysanne en s’appuyant sur le manifeste de l’agroécologie paysanne de Nyéléni ;
  Faire reconnaitre les systèmes semenciers paysans et les droits collectifs dans la politique semencière en cours de révision ;
  Valoriser nos systèmes alimentaires locaux riches de leur diversité culturelle, culinaire et nutritionnelle.
Nous saluons toutes les actrices et tous les acteurs engagés dans la lutte pour faire respecter nos droits coutumiers et honorons ceux qui y ont perdu la vie, comme les victimes de San et de Sanamadougou.
Nous sommes toutes et tous responsables et devrons ensemble jouer notre rôle, car sans terre sécurisée, il n’y aura pas d’agroécologie paysanne, ni de souveraineté alimentaire, ni d’avenir pour les générations futures au Mali.
Légalisons nos droits collectifs légitimes pour un Mali unifié et prospère !

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